Zull dans le désert

Chapitre débuté par Zull

Chapitre concerne : Zull,

Ce texte vaut une bière !
Zull n'avait pas pour habitude de se plaindre. Elle était militaire, bon sang ! Tout un entraînement pour devenir plus forte, plus résiliente, plus organisée. Elle avait passé les vingt dernières années à obéir à ses supérieurs, à évoluer au sein de la hierarchie jusqu'à commander sa propre troupe, elle avait été reconnue pour ses services à deux ou trois reprises au sein de sa garnison. Tout une vie qui, une fois seule dans le désert, finalement, semblait si peu pertinente.

Des semaines... Des semaines et des semaines qu'elle errait dans ce foutu désert puant, espérant pouvoir enfin rencontrer quelqu'un·e qui lui répondrait lorsqu'elle envoyait un message radio, ou qu'elle agitait désespérément les bras dans une tentative bien vaine de contact.
Les quelques silhouettes qu'elle avait pu croiser restaient des jours entiers sans bouger, des piliers de sel au milieu du néant. De guerre lasse, elle avait cru pouvoir se fixer à un endroit, poser quatre tôles, se mettre à l'abri du vent sec et sableux. Ses vivres s'étaient amenuisées comme peau de chagrin, et chasser le lézard n'était pas si facile que ça en avait l'air.

Alors qu'elle entretenait son feu de camp, assise au milieu des décombres du monde, l'esprit en proie au désesepoir qui commençait à s'installer, elle avait allumé la radio. Entre les élucubrations avinées de phénomènes de foire et les borborygmes inintelligibles des adeptes de spiritualité, elle avait entendu quelques paroles sensées, des piaillements d'enfants, et des invectives (voire des menaces à peine voilées) de mercenaires. Elle avait lancé un appel à la mer et trouvé un fil de connexion, une voix chantante qui lui avait proposé de la rejoindre.

Alors, reprenant courage, elle s'était remise en route, suivant les indications de sa nouvelle connaissance, espérant ne pas tomber dans un traquenard. Du sable, partout. Tout le temps. Et puis, soudain, au loin, à la lisière de l'horizon, des panaches de fumée claire qui s'élevaient contre le ciel encombré. Puis la silhouette découpée de quelques bâtiments.
Reprenant courage, elle avait repris sa marche de plus belle.

Devant elle se trouvait les réminiscences de la civilisation : une communauté, presque un port de pêche, pour autant qu'on puisse qualifier un ponton délabré fait de bric et de broc de "port", avec ses mouettes, ses senteurs iodées aux forts relents de pétrole et de varech ; de l'activité humaine, pour elle qui ressentait si fortement la solitude des dernières semaines, voire des derniers mois. À vrai dire, le temps n'était plus tellement pertinent non plus.

Arrivée devant les portes de ce campement, on lui avait ouvert, on l'avait accueillie, et elle se sentait, enfin, "quelque part".